Courrier au DSPIP de Marseille

M. le DFSPIP,

Nous avons eu notification hier de votre courrier daté du 26 mai 2015 nous demandant, sous peine de sanction, de « réinvestir notre place en détention tout particulièrement par la reprise des audiences dans le respect des missions du SPIP ».
Nous nous étonnons, non pas de cette démarche, mais du timing dans lequel vous la
réalisez. En effet, conformément à ce que nous avions annoncé en cours de mouvement, nous avons acté la reprise d’entretiens en détention suite à la mise en place de la réforme des mouvements et des bureaux dédiés.
Cette décision fait suite à la concrétisation d’engagements sur les conditions de notre
intervention en détention, qui nous ont été confirmés en réunion de service du 26/05/2015. Nous savons par ailleurs que cette information vous a été transmise, ce qui n’a toutefois pas empêché la notification de votre courrier… Nous n’en voyons pas l’utilité, si ce n’est un affichage d’autoritarisme. Par ailleurs, nous ne partageons pas l’intégralité du contenu et souhaitons donc vous apporter quelques précisions.
Il est vrai, comme vous le rappelez en introduction, que les conditions d’exercice des
agents du SPIP au CP de Luynes sont marquées par des difficultés depuis plusieurs années. Vous vous êtes effectivement engagé dans une négociation avec l’établissement au dernier semestre 2014, mais rappelons que la dénonciation de ces difficultés est de longue date. Enfin, la décision d’interrompre les entretiens en détention, intervenue il y a deux mois, était notamment due au fait que malgré l’existence de ces négociations et le recensement des difficultés, aucun changement concret n’était constaté dans notre quotidien.
La réunion du 30 mars a effectivement rapidement abouti à des arbitrages effectués
par le directeur interrégional. Ces arbitrages n’ont toutefois pas suffi à faire évoluer notre
positionnement, tout simplement parce que l’équipe ne se contente plus de promesses mais attend des avancées concrètes.
Au jour de votre courrier, certains de ces engagements ont effectivement abouti, mais
contrairement à ce que vous semblez affirmer dans votre courrier, tous ne le sont pas…

– Le SPIP dispose désormais de bureaux dédiés, avec des clés spécifiques. C’est vrai … mais
seulement depuis le 26 mai.
– Les prévenus sont pris en charge, après évaluation, par une orientation DPIP, sauf les suivis affectés.
A ce jour, les nouveaux dossiers de prévenus ne nous sont plus affectés. Cette solution n’est pas partagée par l’équipe pour qui cette organisation présente le triple inconvénient de diminuer artificiellement le nombre de personnes prises en charge, de perdre la connaissance de la situation des prévenus et de surcharger le DPIP du service dont le travail nous paraît prioritaire sur d’autres sujets. Les modalités de suivi dégradé des prévenus que vous revendiquez sont déjà appliquées par l’ensemble de l’équipe, notre charge de travail ne nous permettant pas d’autre choix ! Toutefois, l’affectation des prévenus contribue à connaître a minima leur situation et s’avère pour nous être au final un gain de temps pour la suite.
Par ailleurs, cette disposition modifie de manière profonde l’organisation du service et ne
peut donc être actée qu’après une validation en CT.
– Les semi-libres sont affectés temporairement à l’assistante sociale de l’antenne. C’est vrai
depuis trois semaines. Toutefois, notons plusieurs éléments sur ce sujet.
L’équipe avait demandé une participation de l’AS du service à cette prise en charge.
L’idée était que les CPIP conservent le suivi des détenus issus de la maison d’arrêt placés au QSL et que l’AS prenne en charge ceux arrivant d’autres établissements ou de l’extérieur.
Cette proposition tenait compte des autres missions de l’AS qui se retrouve
actuellement avec un poste intenable : intervention en milieu ouvert pour les CPI, suivi post peine, missions relatives aux droits sociaux et intégralité du QSL.
Rappelons aussi que nous avions demandé dès septembre 2014 à ce que, au vu des
difficultés du service, l’AS puisse assurer des missions de CPIP sur une partie de son temps de travail (refusé malgré un positionnement similaire de la hiérarchie locale).
Que par ailleurs, une CPIP placée intervenait en renfort, notamment sur le QSL,
jusqu’en mars dernier et que sa mission a été brusquement interrompue sans respect de la durée initialement prévue.
– Une note de service relative aux modalités de convocation des détenus a été diffusée, afin de faciliter la présence de ces derniers aux entretiens du SPIP.
C’est exact, mais il s’agit d’une note de service de la maison d’arrêt, par ailleurs datée du
27/05/2015. Pour l’anecdote, la première convocation a d’ailleurs été effectuée avant que nous recevions votre courrier.
– Un formulaire relatif à l’examen des RPS en CAP a été mis en oeuvre. Vrai et faux… Il s’agit du formulaire utilisé aux Baumettes dans lequel la charge de réunir l’ensemble des éléments relatifs aux RPS (travail, formation, parties civiles…) incombe aux services compétents et non pas au SPIP.
Le DI a peut-être acté l’utilisation de ce formulaire à Luynes, mais rien n’a été mis en oeuvre pour que ce système fonctionne. Preuve en est que les négociations étaient toujours en cours cette semaine sur la question de la remise d’attestation par le service scolaire.
– Des priorités de service ont été définies et communiquées. Faux !!! Les priorités sont encore et toujours les mêmes. Ce n’est pas compliqué, le SPIP peut tout éponger : les CPU, les arrivants, les PS, les RPS, les LSC, les demandes d’aménagement de peines, le QSL…
Nous vous l’avons déjà dit, l’ensemble ne rentre pas dans les 7h12 quotidiennes pour lesquelles nous sommes payés ! Nous attendons donc toujours une prise de conscience de votre part et la définition d’un ordre de priorité dans les priorités.
Par ailleurs, nous n’avons été destinataires d’aucun écrit sur ce sujet.
Dans ces conditions, nous constatons que les engagements pris par la Direction de la maison d’arrêt ont davantage avancé que ceux pris par notre propre hiérarchie… ce qui
est pour le moins paradoxal…
Or, nous attendons toujours que l’ensemble des engagements devienne réalité. De même, nous restons attentifs aux projets de réorganisation du service. Nous le redisons, il est irresponsable d’envisager un projet sans connaître les « renforts » qui seront présents en septembre. Nul besoin de préciser que ces nouveaux collègues seront encore en formation pour un an et qu’il est plus que nécessaire de s’interroger dès à présent sur les modalités d’accueil et de formation qui leur seront proposées !
Nous vous renvoyons votre courrier de notification signé, comme vous le
souhaitiez. Néanmoins soyez certain que ce n’est pas cette démarche
d’autoritarisme qui nous aura convaincu !
Pas plus que « l’attachement à notre institution » que vous évoquez en fin de
courrier…
Soyez sûr que notre investissement professionnel a d’autres motivations !

Aix en Provence le 29/05/2015

Ce courrier sera rendu public

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