Le Droit de retrait : explication

Note d’information sur le droit de retrait

La règlementation :
Décret 82-453 du 28 mai 1982 relatif à l’hygiène, et à la sécurité du travail ainsi qu’à la médecine de prévention dans la Fonction publique (articles 5-6 à 5-9 du décret transposé dans le code du travail (art. L4131-1 à L4132-5).

Le principe :
Le droit de retrait permet à un agent de se retirer d’une situation de travail, dont il pense raisonnablement qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé sans encourir de sanction ni de retenue de traitement ou de salaire. (voir schéma général en annexe).

 

Table des matières
1. La procédure d’alerte
2. L’exercice du droit de retrait
  Conditions d’exercice du droit de retrait
  Modalités d’exercice du droit de retrait
  Sanction en cas de non prise en compte de l’alerte ou du retrait (article 5-9)
3. Les limites à l’exercice du droit de retrait (article 5-6 dernier alinéa) 3
Schéma de la procédure en annexe

1. La procédure d’alerte

Le fonctionnaire ou l’agent signale immédiatement à l’autorité administrative (chef de service) ou à son représentant (article 5-7) toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, ainsi que toute défectuosité dans les systèmes de protection (1er alinéa de l’article 5-6). Le signalement peut être effectué verbalement par l’agent
A cet égard, il apparaît tout à fait opportun que le CHSCT compétent soit informé de la situation en cause.
De même un membre du CHSCT qui constate un danger grave et imminent, notamment par l’intermédiaire d’un fonctionnaire ou d’un agent qui a fait usage du droit de retrait, en avise immédiatement l’autorité administrative (chef de service) ou son représentant (1er alinéa de l’article 5-7).
Dans les deux hypothèses le signalement doit être par la suite inscrit de façon formalisée dans le registre spécial mentionné à l’article 5-8 et tenu sous la responsabilité du chef de service.

2. L’exercice du droit de retrait

Conditions d’exercice du droit de retrait

La notion de danger grave et imminent doit être entendue, par référence à la jurisprudence sociale, comme étant une menace directe pour la vie ou la santé du fonctionnaire ou de l’agent, c’est-à-dire une situation de fait pouvant provoquer un dommage à l’intégrité physique ou à la santé de la personne.
• Le danger en cause doit donc être grave. C’est un « un danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée ». « La gravité a donc des conséquences définitives ou en tout cas longues à effacer et importantes, au-delà d’un simple inconfort.
Le côté apparent n’a pas d’importance […]. En revanche, la notion de danger grave conduit à écarter peut pas se retirer au seul motif que son travail est dangereux » Le danger grave doit donc être distingué du risque habituel du poste de travail ou des conditions normales d’exercice, même si l’activité peut être pénible ou dangereuse;
• Le caractère imminent du danger se caractérise par le fait que le danger est « susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché. L’imminence du danger suppose qu’il ne se soit pas encore réalisé mais qu’il soit susceptible de se concrétiser dans un bref délai. Il convient de souligner que cette notion n’exclut pas celle de « risque à effet différé » ; ainsi, par exemple, une pathologie cancéreuse résultant d’une exposition à des rayonnements ionisants peut se manifester après un long temps de latence mais le danger d’irradiation, lui, est bien immédiat. L’appréciation se fait donc au cas par cas ».
Il y a donc danger grave et imminent, lorsque la personne est en présence d’une menace susceptible de provoquer une atteinte sérieuse à son intégrité physique ou à sa santé, dans un délai très rapproché.
Par ailleurs, le droit de retrait est un droit individuel : l’agent doit estimer raisonnablement qu’il court un risque grave et imminent pour sa santé et sa sécurité.
L’exercice du droit de retrait impose préalablement ou de façon concomitante la mise en œuvre de la procédure d’alerte telle qu’elle résulte de l’article 5-6, alinéa 1 et de l’article 5-7, alinéa 1.
Enfin, d’une façon générale, le droit de retrait de l’agent doit s’exercer de telle manière qu’il ne crée pas pour autrui une nouvelle situation de danger grave et imminent (article 5-6 alinéa 3 du décret). Par « autrui », il convient d’entendre toute personne susceptible, du fait du retrait de l’agent, d’être placée elle-même dans une situation de danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé. Il peut donc s’agir de collègues de l’agent, mais aussi, le cas échéant, de tiers tels que les usagers du service public. Quant au caractère nouveau de la situation de danger, celle-ci peut être identique mais concerner un tiers, tel un collègue de travail ; la situation pourrait par contre présenter un contenu différent dans la mesure où elle concernerait un usager

Modalités d’exercice du droit de retrait

Le droit de retrait prévu par l’article 5-6 constitue pour l’agent un droit et non une obligation.
A la suite du signalement d’un danger grave et imminent soit par l’agent directement concerné soit par un membre du CHSCT, l’autorité administrative ou son représentant doit procéder sur le champ à une enquête.
Si le signalement émane d’un membre du CHSCT, celui-ci doit obligatoirement être associé à l’enquête. La présence d’un membre du CHSCT doit cependant être préconisée lors du déroulement de l’enquête, quel que soit le mode de signalement du danger grave et imminent en cause.
En toute hypothèse, l’autorité administrative doit prendre les dispositions propres à remédier à la situation du danger grave et imminent, le CHSCT compétent en étant informé.
En cas de divergence sur la réalité du danger ou la manière de la faire cesser, l’autorité administrative a l’obligation de réunir d’urgence le CHSCT compétent, au plus tard, dans les 24 heures, l’inspecteur du travail territorialement compétent et désigné, est informé de cette réunion et peut assister à titre consultatif à la réunion de ce CHSCT.
En dernier ressort, l’autorité administrative arrête les mesures à prendre, et met, si nécessaire en demeure par écrit l’agent de reprendre le travail sous peine de mise en œuvre des procédures statutaires, dès lors que la situation de danger grave et imminent ne persiste plus, ou que le retrait a été considéré comme étant injustifié.
A défaut d’accord sur ces mesures entre le chef de service et le CHSCT compétent, l’inspecteur du travail est cette fois obligatoirement saisi et met en œuvre la procédure prévue à l’article 5-5 du décret.

Sanction en cas de non prise en compte de l’alerte ou du retrait (article 5-9)

En ce qui concerne les agents non fonctionnaires, l’article 5-9 du décret prévoit à leur profit le bénéfice du régime de la faute inexcusable de l’employeur tel que défini aux articles L. 452.1 et suivants du code de la sécurité sociale, dès lors qu’ils auraient été victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un membre du CHSCT avaient signalé au chef de service ou à son représentant le risque qui s’est matérialisé.
Ce dispositif qui relève du régime général de la sécurité sociale permet, dans les conditions posées par les articles L.452-2 à L.452-5 du code de la sécurité sociale, à l’agent victime de bénéficier d’une indemnisation complémentaire du préjudice qu’il a subi.

3. Les limites à l’exercice du droit de retrait (article 5-6 dernier alinéa)

L’exercice de certaines activités de service public peut être incompatible par nature avec l’usage du droit de retrait. Il en va ainsi des activités liées directement à la sécurité des personnes et des biens exécutées dans le cadre notamment du service public des douanes, de la police, de l’administration pénitentiaire et de la sécurité civile.
Le IV de l’article 5-6 du décret du 28 mai 1982 prévoit que « la détermination des missions de sécurité des biens et des personnes qui sont incompatibles avec l’exercice du droit de retrait individuel en tant que celui-ci compromettrait l’exécution même des missions propres de ce service, notamment dans les domaines de la douane, de la police, de l’administration pénitentiaire et de la sécurité civile, est effectuée par voie d’arrêté interministériel ».
Cette limite dans l’exercice de ce droit revêt donc une particulière importance dans les services de l’administration pénitentiaire parce que chaque agent d’une part, est responsable de tâches difficilement dissociables de la préservation de la sécurité collective et d’autre part, assume la continuité du service public à l’égard de personnes privées de liberté.
Ces missions, propres à l’administration pénitentiaire, ont été précisées dans l’arrêté interministériel du 10 avril 1997 portant détermination des missions de sécurité des biens et des personnes MJ SG SRH SDSDSQVT BSQVT mars 2020 incompatibles avec l’exercice du droit de retrait individuel du personnel pénitentiaire et sont les suivantes:
– garde et surveillance des détenus ;
– protection des détenus ;
– maintien de l’ordre intérieur des établissements pénitentiaires ;
– transfèrement et extraction des détenus ;
– formalités d’écrou.
Les conditions d’exercice du droit de retrait, les restrictions qui sont apportées à ce droit et les procédures à mettre en œuvre en cas de risque grave et imminent à l’administration pénitentiaire font l’objet de la circulaire du 26 mars 1998.

Schéma de la procédure