Compte-rendu : CSA SPIP des 19 décembre et 19 janvier et du 30 janvier 

Après avoir successivement essuyé les humeurs du DAP, une proposition de CSA un lendemain de Noël, des documents non transmis ou bien à la dernière minute et les remarques incessantes de l’administration quant à leur lassitude que les élus CGT IP proposent des amendements en instance sur des documents pourtant essentiels mais indigestes, nous avons enfin éclusé l’ordre du jour du CSA initialement prévu le 16 novembre 2023.
Il aura fallu 2 mois et demi.

Force est toutefois de constater qu’un dialogue social de qualité et constructif n’est, lui toujours pas à l’ordre du jour.

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Le guide DDSE

C’est un incroyable patchwork de près de 180 pages de contradictions et de répétitions, que l’administration a présenté comme un « guide opérationnel », censé être une actualisation de celui de 2013.
180 pages qui ne répondent ni aux problématiques des collègues ou à celle des usager.ère.s face à l’inflation des mesures de surveillance électronique, ni aux lacunes matérielles.
180 pages qui ne sont en réalité qu’une démonstration des orientations politiques de la DAP sur le sujet : transferts de compétences des CPIP vers les ASE, des magistrat.e.s vers les CPIP, imprécisions juridiques, positions plus que discutables sur le prononcé de ces mesures ou le profil des personnes qui pourraient en bénéficier, promotion à tout-va du RPO, références aux astreintes …

Au détriment de leur santé mentale, les élu.e.s CGT IP du CSA ont décortiqué l’ensemble du guide.
Notre pugnacité, n’en déplaise à certain.e.s, a payé sur certains points, notamment la sacralisation des greffes pénitentiaires comme garants de l’écrou (du RDI à l’écrou déporté, il n’y a parfois qu’un pas), la clarification du rôle des ASE dans le traitement des incidents (techniques uniquement), la latitude des CPIP dans leur évaluation de la situation des usager.ère.s pour l’examen des modifications horaires, rappel que la charge de l’avis à victime repose bien sur l’autorité judiciaire …
En revanche, malgré des amendements présentés en ce sens, l’administration a refusé la possibilité d’intervention en binôme à la demande des ASE pourtant essentielle tant pour leur sécurité que pour l’accompagnement des publics se retranchant une nouvelle fois derrière des contraintes RH auxquelles elle n’apporte par ailleurs aucune réponse. L’administration a également refusé de limiter les astreintes ou de garantir le respect des droits des agent.e.s en la matière, de revendiquer la primauté du SPIP sur l’associatif pour les enquêtes ou encore de valoriser l’indispensable aide à la décision judiciaire que représente l’expertise du SPIP préférant reconnaître la fine connaissance des publics aux magistrat.e.s …
Ce n’est pas faute pour la CGT IP d’avoir demandé des avancées sur ces points !

Sur de nombreux sujets, dont certains relevaient pourtant de la pure lecture de la loi, la DAP a préféré réserver son avis à celui de la DACG, tout en sollicitant tout de même le vote des OS sur un document au contenu, par conséquent, provisoire ! C’est à se demander pour qui travaille notre administration ?

Pour cette raison, mais aussi parce que nous n’étions en accord ni avec la forme ni avec le fond, parce que la défense des missions mais aussi des droits de chacun est primordial, les élu.e.s CGT IP au CSA SPIP ont voté contre ce guide.

Pour rappel, il y a un an, l’administration lançait un appel à candidature pour que certains SPIP  « confient », c’est-à-dire externalisent pour ne pas dire délèguent, sous le pilotage du SPIP, à des structures associatives privées l’organisation des peines de stage mais également d’actions collectives relative à l’insertion sociale des publics qui, selon notre propre administration, ne relèveraient pas du champ d’expertise du SPIP : parentalité, accès aux droits, citoyenneté …

Ce que nous craignions semblait se confirmer dans les services « expérimentateurs » : des collègues dépossédé.e.s de stages et actions qu’ils mettaient déjà en œuvre au profit associations avec toutes les conséquences financières qui en découlent tant pour les services que pour les usagers.ère.s, pilotage et évaluations hasardeuses, trust des grosses associations concurrentielles à la gestion questionnante (cf les articles de presse récents sur plusieurs d’entre elles), conflits d’intérêts majeurs lorsque des membres de l’autorité judiciaire ont leur place dans les conseils d’administration de certaines associations.

Informé.e.s que cette « expérimentation » était reconduite mais aussi étendue pour l’année à venir et incitée par son inscription au titre des objectifs des DFSPIP, nous avons demandé à ce que nous soit présenté son bilan.

L’administration a donc présenté pêle-mêle une série de pourcentages (tirés d’un énorme document qui ne nous avait pas été transmis en amont), censée démontrer la réussite et la plus-value de cette expérience de délégation, sans être jamais en capacité de qualifier les contours de cette plus-value autrement que par l’augmentation du volume des stages et actions. La DAP a également confirmé l’élargissement de la dite expérimentation passant de 18 SPIP « expérimentateurs » à 35 SPIP en 2024. Un tiers des services. Et tous ces services sont bien sûr enthousiastes et volontaires. Que la CGT IP reçoit d’autres sons de cloche de toute la France relèverait-il de l’hallucination auditive ?

Nous avons demandé la transmission du bilan écrit dans son intégralité et ne manquerons pas d’en faire un examen attentif pour mettre le discours dithyrambique de l’administration face aux réalités de cette « expérimentation » qui n’en a que le nom et qui constitue un pas de plus dans le saccage du service public au profit d’associations ô combien lucratives.

Trop régulièrement interpellée par les syndicats locaux au sujet d’arrestations par les forces de l’ordre d’usager.ère.s dans et aux abords immédiats des SPIP, parfois même avec la complicité de DPIP un peu trop zélé.e.s, la CGT IP a souhaité entendre, à nouveau, la position de l’administration sur ce point. Il est pour nous de leur devoir de protéger l’ensemble des agent.e.s des SPIP mais aussi les personnes accompagnées par nos services de cette dérive.

Pour nous, ce procédé est également absolument contraire à toutes les préconisations en matière d’accompagnement de nos publics (REP, RPO) et place les agent.e.s dans la position insupportable d’auxiliaires de police. Police qui n’hésite d’ailleurs pas à s’engouffrer dans les brèches du silence de l’administration : demande d’informations sans réquisition, directement auprès des CPIP à qui la mesure est affectée, mais même parfois auprès des agent.e.s d’accueil, ou des permanencier.e.s. Reproches et menaces après lesdites interventions si le SPIP est soupçonné de ne pas avoir suffisamment joué le jeu.

Ce problème, récurrent et ancien, avait conduit en 2015 puis en 2016 à un rappel du Ministère aux autorités judiciaires en charge des services d’enquêtes des règles en la matière. Le DAP, en février 2022, promettait l’imminence d’un protocole avec les Forces de Sécurité Intérieure.

Depuis, ni son, ni image. Nous avons eu la surprise d’apprendre que si un projet de protocole avait bien été soumis au Ministère de la Justice, il était en attente de validation par l’Intérieur. Depuis 2 ans !
Deux années qui auraient utilement pu être mises à profit pour recueillir l’avis des organisations syndicales sur le contenu de ce projet et procéder à un rappel de la DAP vers les DI et les autorités judiciaires des préconisations en la matière. C’est sans compter, évidemment, sur la passivité de notre administration lorsqu’il s’agit de faire preuve d’initiatives pour la protection de ses propres services.

Nous avons demandé à ce que le projet de protocole nous soit communiqué, ce que l’administration a refusé arguant qu’il n’était pas question de « co-construction ». Il est vrai qu’on peut faire une confiance aveugle à notre administration tant elle témoigne régulièrement de ses lacunes à s’imposer face à d’autres directions ou ministères …

Néanmoins le DAP s’est engagé à relancer le ministère de l’Intérieur. Ils peuvent compter sur la CGT IP pour les rappeler à leurs engagements.

Si le ministre s’auto-congratule de l’augmentation du budget de la Justice en 2024, il oublie de préciser que celui alloué à l’administration stagne et qu’il est phagocyté par la construction de nouveaux établissements dont on sait pourtant, puisque la nature a horreur du vide, qu’ils ne régleront jamais le problème de la surpopulation carcérale et qu’il ne s’agit que d’un affichage populiste financé par les deniers publics à hauteur de 341 millions d’euros! C’est autant d’argent qui n’ira pas aux SPIP, ni à la réinsertion, à la préparation à la sortie, aux activités, aux prises en charge éducative, sanitaire ou sociale et qui grèvera même le déjà si maigre volume des postes en SPIP. En effet, sur les 132 postes de CPIP, une vingtaine est dédiée… à l’ouverture de nouveaux établissements.

Malgré tout et face au constat d’échec de l’atteinte des objectifs des effectifs de référence, l’administration se fixe deux priorités budgétaires pour le moins étonnantes : PRISME et l’immobilier non spécifique.
Notre administration n’est rien allée chercher pour les conditions de travail de ses agent.e.s qu’ils soient CPIP, DPIP, PA… Pire, ils ne pensent même pas à la manière dont les SPIP sont censés fonctionner avec si peu de moyens si ce n’est dans une optique sécuritaire de développement des DDSE et des BAR et préfèrent financer l’associatif pour palier la prétendue insuffisance des SPIP qu’ils ont eux-mêmes œuvré à créer !

La CGT IP souhaitait de longue date que des fiches de postes Agent.e.s de Surveillance Électronique soient retravaillées car nos collègues ASE servent bien trop souvent de variables d’ajustement. Si la DAP s’est bien saisie de cette demande, elle a toutefois fait le choix de n’associer aucune organisation syndicale à leur élaboration, en groupes de travail.
Choisir ses interlocuteur.rice.s, c’est toujours plus simple !

La CGT IP a insisté pour que ces fiches de poste soient examinées en CSA SPIP mais la DAP s’y refuse, considérant qu’elles ne rentrent pas dans le champ des attributions de l’instance et donc qu’elle est parfaitement en droit d’établir unilatéralement le contenu de ces fiches. . Si cet argument est déjà contestable, les dispositions du décret ne sont pas limitatives et rien n’empêche l’administration d’engager un dialogue social de qualité avec les OS représentatives de ses personnels.

Nos demandes ont toutefois permis que la sous- direction de l’insertion et de probation nous convie, en mars, à des groupes de travail à cet effet. Nous veillerons à ce qu’ils ne se limitent pas à une présentation unilatérale des travaux déjà faits et nous assurerons qu’aussi bien les missions et les droits des agent.e.s soient respectés.

Il s’agissait du seul point inscrit à l’ordre du jour par l’administration à la dernière date de l’instance (le 30 janvier).
Après plusieurs groupes de travail, menés au niveau ministériel par le Secrétariat Général, lors desquels la CGT IP a pu faire remonter les interrogations légitimes d’organisation des SPIP pendant cette période des JOP et alors que des consignes toutes plus lunaires les unes que les autres se multiplient dans les DISP, nous espérions que l’administration entende cette fois apporter des réponses à hauteur des difficultés qui vont émerger en juillet 2024. C’était sans compter l’impréparation, la méconnaissance du rôle et de l’organisation des SPIP et l’incompétence de nos interlocuteur.rice.s !
Pour seule présentation, la lecture d’une fiche RH de 5 pages qui indique, pour les DISP de Paris et Marseille (les plus impactées par la tenue des JO), des pourcentages de présence minimale dans les services, des préconisations de télétravail et des remontées de plaques d’immatriculation pour que les véhicules de service puissent circuler dans les zones de restriction.
Par exemple, la note préconise que 50 % des personnels des SPIP soient présents, dont la moitié pourraient être en télétravail, mais l’administration est incapable de présenter le schéma de réflexion sur les besoins ayant conduit à ce ratio et invoque une incertitude quant à l’impact de l’événement sur les charges de travail. A
lors qu’elle affirme qu’aucun besoin particulier n’est relevé, la DAP se refuse à écrire expressément que les autres DISP ne seront pas impactées et donc qu’aucune contrainte d’organisation ne sera donnée, elle préfère laisser faire les DI.

Pour la CGT IP, il est inconcevable de raisonner de cette manière. Une approche de restriction des activités aurait davantage de sens que de sans cesse faire porter davantage de contraintes, sur les agent.e.s, L’administration s’est montré sourde et a démontré sa totale méconnaissance des réalités du travail en SPIP en renvoyant sans cesse à l’Intérieur, au Secrétariat Général ou aux DISP.
Par ailleurs, nous n’avons obtenu aucune réponse quant aux déplacements des usager.ère.s qui sont absolument absent.e.s du discours de la DAP, qui semble une nouvelle fois oublier que nous sommes un service public. Rien non plus sur l’accueil des stagiaires, sur l’organisation du travail des ASE dont les déplacements pour les poses vont nécessairement être laborieux
Si une prime est bien évoquée, on ne sait ni à quel.le.s agent.e.s elle serait destinée, ni son montant, ni les contours d’attribution …

Ces discussions nous ont laissé la très amère sensation que notre propre administration préfère satisfaire les désidératifs du ministère de l’Intérieur et laisser le champ libre aux excentricités des DI plutôt que de faciliter le travail de ses agent.e.s.
Il reste beaucoup de points à résoudre avant que l’administration pénitentiaire soit prête à faire face à cette période qu’elle juge pour sûr très perturbée. Il faut finir le travail, et de préférence avant septembre !

La CGT IP reviendra à la charge aussi souvent que nécessaire pour obtenir les réponses aux légitimes questions de nos collègues concerné.e.s !

Si le ton du CSA SPIP du 30 janvier était plus détendu que les dernières instances que nous avions subies, la CGT IP ne peut que constater une fois de plus qu’en matière de dialogue social avec notre administration, tout est compliqué, rien n’est fluide. A nos légitimes questions, les seules réponses restent trop souvent au choix soit l’exaspération de nos interlocuteurs et interlocutrices, soit le début d’une partie de ping pong avec les DISP, le secrétariat général du ministère, la direction de la fonction publique, ou n’importe qui mais pas eux.elles !

Que notre administration se le dise, elle pourra continuellement tenter de mésentendre la définition d’un dialogue social de qualité, user de postures d’exaspération afin de servir l’opacité et l’immobilisme, chercher à clore les débats en se servant toujours des mêmes rhétoriques de répétitions et manifester son opposition farouche à la force de proposition de notre organisation syndicale, forte de la représentativité des services que nous représentons majoritairement, pour la défense des missions de l’ensemble des corps de personnel travaillant en SPIP et de leurs droits, la CGT IP ne lâchera rien !!!