Traduction de l’article du New-York Times du 27 juillet 2016

Questionnement des français : comment l’assassin du prêtre, connu comme représentant une menace, aurait pu être arrêté ?

 27 juillet 2016

La question qui dérangeait la France mercredi à la suite de l’attaque par un adolescent, aspirant à aller en Syrie, mais préférant finalement couper la gorge d’un prêtre, était de savoir si le crime était un résultat d’échecs gouvernementaux français, et ce qui pourrait avoir été fait pour l’empêcher.

Le choc de l’attaque n’a pas étouffé de nouvelles accusations politiques, avec des questions immédiatement brandies sur la façon dont un criminel bien connu des autorités a été néanmoins laissé libre de tuer.

Pour les politiciens et une grande partie du public, il était difficile de l’ignorer, le crime a été commis pendant un état d’urgence donnant déjà au gouvernement des pouvoirs supplémentaires pour étouffer des terroristes potentiels. Un des criminels était apparemment en liberté surveillée et astreint au port d’un bracelet électronique au moment de l’attaque.

Des questions et préoccupations semblables avaient été soulevées en Juin, quand un homme qui avait passé de temps en prison pour conspiration terroriste et largement connu des services de police avait poignardé à mort un couple de policiers à Magnanville, en banlieue parisienne.

L’attaque de Mardi, survenant moins de deux semaines après le 14 juillet, le jour du massacre à Nice où 84 personnes ont été tuées par un conducteur de camion tunisien, n’a fait seulement que plonger un peu plus le pays dans la terreur.

La France est officiellement laïque certes mais le catholicisme est profondément ancré dans la culture du pays. Cela a don induit un choc symbolique encore plus grand par le biais du meurtre du Père Jacques Hamel.

Une messe à la cathédrale de Notre-Dame, réservée aux évènements publics les plus solennels, a eu lieu mercredi soir en mémoire du Père Hamel, 85, dont les assaillants l’ont forcé à s’agenouiller avant de le tuer dans l’ancienne église en pierre de Saint-Étienne- du-Rouvray, en Normandie. Une grande partie du gouvernement et deux des trois anciens présidents vivant en France y ont assisté.

Simultanément, un sentiment d’impuissance inédit s’installait. L’un des assaillants, Adel Kermiche, 19 ans, avait essayé deux fois d’aller en Syrie. Mercredi, l’État islamique a publié une vidéo dont l’enregistrement aurait été fait avant l’attaque par le tueur et son complice dans laquelle ils ont fait allégeance au groupe islamique.

  1. Kermiche, comme l’attaquant à Nice, Mohamed Lahouaiej Bouhlel, avait un parcours émaillé de troubles psychiatriques, selon le journal Le Monde, dont les sources judiciaires authentiques ont imprégné l’édition de mercredi, propos d’ailleurs confirmés par le bureau du procureur de Paris, ce qui conduit à toujours plus d’interrogations sur le phénomène terroriste.

Mais contrairement à M. Lahouaiej Bouhlel, M. Kermiche était déjà dans le viseur de la Justice.

En effet, il y a à peine quatre mois, un juge l’avait libéré, convaincu par les arguments de jeunes franco-algériens qu’il était prêt pour mener une vie normale loin d’aspirations djihadistes.

À l’époque, le bureau du procureur de Paris avait fait appel de la décision du juge, en préconisant que M. Kermiche reste derrière les barreaux.

Le procureur dénigrait les arguments du juge des libertés surveillées, les qualifiant de «parfaitement illusoires, compte tenu du contexte, » selon les sources citées dans Le Monde. «Il a clamé à une erreur judiciaire, demandant une seconde chance. Mais il y avait un très grand risque.  »

Une fois déjà, en 2015, après l’échec de sa tentative d’à aller en Syrie, M. Kermiche avait été autorisé à se déplacer librement sous réserve de l’accord des services de probation. Il a outrepassé cette injonction au bout de six semaines afin d’essayer une seconde fois d’aller en Syrie. Cette fois, il n’a pas dépassé la Turquie, où les autorités l’ont arrêté.

Quand il a été capturé la deuxième fois, il a été mis en détention préventive jusqu’au 18 Mars de cette année, quand il a comparu devant le juge qui, finalement, le laissa libre.

Cette fois, équipé d’un bracelet électronique à la cheville avec interdiction de quitter son département de la Seine-Maritime, il devait faire rapport à un agent de probation au poste de police une fois par semaine. Vivant dans la maison de ses parents, il était autorisé à quitter son domicile seulement de 8 :30 à 12:30 en semaine.

Toutes ces mesures se sont avérées inutiles. Il était environ 09h25 mardi – dans sa période de libre circulation – quand M. Kermiche et un complice ont fait irruption dans l’église armés de couteaux, pour tuer le Père Hamel et blesser un de ses paroissiens.

Les agents de probation qui le surveillaient ont eu très peu de formation appropriées au terrorisme sont surchargés de travail, a déclaré Sarah Silva Descas, secrétaire général de la branche de la C.G.T. – syndicat représentant les agents de probation et de libération conditionnelle. La plupart de leurs suivis sont des criminels de droit commun et pas des terroristes.

«Il y a une énorme pression sur notre personnel, nous ne sommes pas prêts à faire face à cela, » dit-elle.

Les agents de probation et de libération conditionnelle, nous dit Mme Silva Descas, sont formés pour aider les gens à se réinsérer dans la communauté et trouver un emploi, voire obtenir un traitement médical si elles ont des problèmes physiques, psychiatriques ou même des problèmes de drogue.

Pourtant, dans les affaires de terrorisme, ils sont appelés à servir d’agents de renseignement, de lanceurs d’alerte pour des signes de radicalisation potentielle.

Un de ses collègues, qui a été affecté à suivre M. Kermiche d’après Mme Silva Descas dit que « son suivi n’était pas un échec ».

«Elle a eu rendez-vous avec lui chaque semaine», a déclaré Mme Silva Descas. « Elle avait veillé à son emploi. Il était venu à l’ensemble de ses convocations. »

« Peut-être qu’elle se le reproche, mais elle ne devrait pas. On peut faire beaucoup de choses, mais il n’existe pas de risque zéro. « , A-t-elle ajouté.

Le bracelet électronique ne comportait pas une puce de localisation satellite de type GPS, comme cela est souvent utilisé pour les délinquants sexuels, mais indiquait seulement si M. Kermiche était à son domicile quand il était censé y être.

« Étant donné que M. Kermiche a commis le crime au cours des heures de sortie, il était autorisé à être loin de son domicile pour raisons professionnelles, le bracelet ne pouvait pas détecter quelque infraction. » explique Mme Silva Descas.

Le deuxième attaquant n’a pas encore été formellement identifié, mais plusieurs médias français ont affirmé qu’il n’avait pas de casier judiciaire. Ses empreintes digitales ou son ADN n’étant pas dans le système IT de la police, fait qui ralentit les efforts pour l’identifier. La personne dont l’identité semble correspondre le plus étroitement est aussi âgée de 19 ans, le même âge que M. Kermiche, mais contrairement à ce dernier, le complice serait originaire de l’est de la France.

 

Le gouvernement a été acculé Mercredi pour affermir encore d’avantage sa position en matière de sécurité, ce dernier ayant argué comme il le fait souvent que les libertés fondamentales ne peuvent pas être sacrifiées au nom de la sécurité.

« Nous ne pouvons pas renoncer à la règle de droit, afin de protéger la primauté du droit», a déclaré le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve à des journalistes à l’extérieur du Palais Présidentiel de l’Elysée mercredi matin.

« Si nous renonçons à nos libertés, à nos principes constitutionnels, à nos principes républicains, » at-il ajouté, « nous sanctifierons la victoire des terroristes. »

Mais il est évident que le gouvernement est en train de perdre philosophiquement avec ses arguments pour les libertés civiles. Le rythme des attaques semblant augmenter, tandis que la popularité du gouvernement continuant à baisser toujours plus.

  1. Kermiche « avait une Fenêtre de Tir de plusieurs heures, dans laquelle il pouvait passer à l’action», a déclaré M. Fenech. «J’aurais préféré le voir sous surveillance constante. »
  2. Fenech réclame un «Guantánamo Français» pour les vétérans islamiques de Syrie. Il a déclaré dans une interview mercredi que lorsque le travail parlementaire reprendra après sa pause estivale, «Nous allons frapper beaucoup plus fort.»
  3. Fenech présentera les lois criminalisant les comportements radicaux, ainsi que les centres d’internement pour les suspects de terrorisme. Les listes gouvernementales d’individus concernés, impliqueraient potentiellement des milliers de personnes.

Cette idée est de plus en plus souhaitée par les membres de la Droite Dure présents sur des listes électorales. L’ancien président Nicolas Sarkozy, un concurrent de premier plan dans la course présidentielle de l’année prochaine, a proposé un projet très similaire dans une interview dans Le Monde mercredi même.

« Le Gouvernement doit répondre à la question suivante: Comment est-ce possible que des individus connus des services de police, dont un sous contrôle judiciaire pour avoir tenté de participer au Jihad en Syrie, ont pu commettre une telle attaque ? » a demandé à M. Sarkozy.