Déclaration liminaire Comité technique ministériel 17 mars 2015

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Madame la Ministre,

 

Ce premier Comité technique après les élections professionnelles du 4 décembre dernier s’inscrit comme dans tous les autres ministères dans un contexte de plus en plus difficile.

 

Les politiques d’austérité toujours plus réaffirmées avec maintenant 54 milliards d’économie comme objectif du gouvernement Hollande ont des conséquences dramatiques sur l’ensemble des services publics, augmentant toujours plus les inégalités sociales.

 

Le service public de la Justice, dit prioritaire est en réalité loin d’être privilégié.

Tout d’abord, parce que ses budgets n’ont jamais été à la hauteur d’une Justice digne de ce nom !

Que les conditions de travail continuent de se dégrader, que les manques de moyens sont toujours aussi criants et que les emplois sont tout autant insuffisants.

Que les emplois et crédits annoncés ne sont pour le moment que des perspectives qui ne prennent aucune réalité pour les personnels, et qu’elles se feront au détriment d’autres besoins, d’autres emplois, au sein même du ministère.

Que le plan annoncé suite aux attentats de janvier dernier, dont les options politiques sous-tendent des dérives sécuritaires que nous dénonçons, se fera à budget constant.

 

Sur ce point et puisque nous sommes à l’ouverture d’une nouvelle mandature, nous espérons une amélioration du dialogue social.

Merci de ne plus instrumentaliser la présence des organisations syndicales à des réunions pour la traduire par un soutien à une politique que nous rejetons comme c’est le cas avec le plan anti-terroriste avec un communiqué scandaleux de votre service de presse.

A la CGT, nous ne sommes pas et nous ne serons jamais dans des stratégies populistes qui consistent à répondre à l’émotion par des effets d’annonce sans lendemain. Ce n’est pas pour raison de terrorisme que nous avons besoin d’emplois et de moyens supplémentaires, c’est parce qu’ils manquent tout simplement…

 

Parallèlement, nous voyons des réformes se mettre en place ou se dessiner dans la plus grande opacité : réforme territoriale, revue des missions de l’Etat, entre autres, qui auront un impact fort sur nos missions, le sens de notre travail, nos organisations de service, notre vie en tant que fonctionnaires mais également en tant que citoyennes et citoyens.

 

Aujourd’hui, il est très complexe pour les personnels du ministère de s’y retrouver et de penser une Justice rénovée ambitieuse à la hauteur des besoins de service public.

 

Ce ne sont pas les orientations que vous semblez vouloir prendre suite aux travaux sur la Justice du XXIème siècle qui vont permettre d’atteindre ces objectifs pourtant largement affichés et qui ont présidé aux débats.

Ainsi, les craintes que nous pouvions exprimer lors de la Commission Permanente d’Etudes (CPE) du 27 janvier dernier concernant la localisation des emplois, se confirment. Bien que l’administration s’en soit défendue à ce moment là, nous assurant que la volumétrie des emplois de greffiers en chef ne serait pas remise en cause, la publication de la liste des postes offerts à la mobilité pour ce corps semble nous donner raison puisqu’elle consacre la disparition d’une cinquantaine de postes localisés dans les TI et les CPH, souvent des postes du 1er grade, sans que cela ait fait l’objet de la moindre discussion. Faut-il rappeler que si l’administration n’a pas l’obligation de pourvoir tous les postes vacants, elle a cependant celle de les publier. L’absence de concours de greffiers en chef en 2015 et d’apurement de la liste complémentaire concernant le recrutement effectué en 2014, ne peuvent que conforter nos craintes.

S’agissant de la loi ordinaire « J21 », si quelques rares orientations vont dans le bon sens, la plupart des grandes lignes du projet qui nous a été présenté est loin de recueillir notre assentiment. Ainsi, si le développement de la médiation ne nous pose pas de difficultés bien au contraire, sous réserve cependant d’avoir un retour des expérimentations arrageoise et bordelaise, il n’en est pas de même de celui de la procédure participative qui fait la part belle aux avocats et ne permet donc pas de garantir l’égal accès au droit, un des objectifs pourtant affiché dans cette loi. Ne parlons pas des transferts de compétences des TI vers les TGI, qui sous couvert de dispositions relatives à la gouvernance, entérinent à plus ou moins brève échéance l’émergence du TPI (ou JUPI) pourtant largement décrié et rejeté. Nous ne pouvons davantage accepter de nouveaux transferts de missions de service public vers les notaires, en l’espèce « la procédure d’envoi en possession » (outre le fait que cette procédure sera désormais payante, se pose aussi le problème de l’absence de contrôle du juge).

Concernant la justice commerciale, si l’introduction de règles déontologiques ne peut pas nuire à ce pan de justice, nous aurions souhaité une réforme plus ambitieuse allant jusqu’à la fonctionnarisation des tribunaux de commerce.

 

 La réforme de l’ordonnance de 1945 est au point mort. Ce n’est pas pour nous surprendre et cela conforte l’analyse de la CGT. Nous constatons le refus de ce gouvernement d’avoir une ambition sur ce dossier depuis trop longtemps. De plus le texte qui nous était soumis était tellement peu progressiste qu’il n’affichait aucune volonté politique de rompre avec l’empilement des mesures de 10 ans de droite…

C’est sur ce dossier comme sur d’autres, le syndrome récurrent d’un parti « socialiste » et de ses alliés, de refuser de faire une politique de gauche… Après le cabinet de Valls, c’est celui de Hollande qui renvoie à l’année prochaine au mieux ce texte… Nous continuerons à porter la volonté d’une rénovation de l’ordonnance de 45 avec tous les progressistes, parce que nous conservons la certitude avec Victor Hugo, qu’il faut ouvrir des écoles pour fermer les prisons, et même si ce discours n’est pas dans l’air du temps.

 

Quant à la loi du 15 août 2014 concernant la réforme pénale, les changements en termes de politique sont encore très timides.

La surpopulation pénale est toujours aussi intenable et la perspective d’encellulement individuel toujours aussi lointaine.

Les personnels désireux de voir leur travail reprendre du sens et de voir leurs conditions d’exercice mises en adéquation avec un objectif d’une meilleure qualité de prise en charge de ses publics, sont encore soumis à des injonctions paradoxales.

Ces injonctions paradoxales sont d’autant plus intenables pour l’ensemble des personnels qu’elles s’associent à un management qui s’est beaucoup trop inspiré des méthodes du privé, dévastatrices en termes de collectif de travail et de santé au travail.

Ce ne sont pas les quelques faibles mesures catégorielles bien loin des attentes légitimes des personnels en termes de reconnaissance professionnelle et de pouvoir d’achat qui réduiront ce mal-être.

Dans la même veine, le régime indemnitaire (RIFSEEP) qui doit se mettre en place pour les filières sociale, administrative et les corps communs en juillet prochain doit attirer toute notre attention. La CGT porte une toute autre vision de la rémunération et de l’indemnitaire, ce qui ne l’empêchera pas d’être extrêmement vigilante à ce que les personnels ne paient pas les pots cassés d’une bascule mal préparée.

Concernant la gestion des Agents Non Titulaires, nous déplorons que notre ministère n’ait pas rompu avec ses anciennes habitudes. La conjonction d’un faible volume de titularisations par épreuves spécifiques (souvent trop sélectives), le recrutement insuffisant par concours ordinaire, le maintien d’un fort recrutement de contractuels, et le raccourcissement des durées cumulées de contrats sur besoins temporaires, aggrave et fragilise la situation des contractuels en CDD qui répondent à des besoins permanents. Les non-renouvellements de contrats sont monnaie courante, avant les 4 ans requis pour être titularisés, ou avant les 6 ans permettant d’avoir un contrat à durée indéterminée.

 

Par ailleurs, nous sommes surpris de n’avoir toujours pas de réunion prévue de la CCP, plus de trois mois après les élections.

De même, le  Groupe de travail sur le suivi de mise en œuvre de la loi « Sauvadet » ne s’est-il plus réuni depuis le 3 juin 2014, ce qui nous laisse sans information sur le bilan provisoire du processus de titularisation et sans vision sur sa poursuite. »

 

Nous espérons que cette année 2015 permettra la finalisation d’une circulaire sur les droits syndicaux (dialogue social) au ministère de la Justice qui soit un réel progrès par rapport à la circulaire Vauzelle notamment quant à la reconnaissance du travail syndical accompli dans les départements et les régions. Trop souvent en effet, l’activité syndicale, y compris la participation à des instances, n’a aucune incidence sur la charge de travail des militants qui assurent donc ce dialogue en plus de leur activité professionnelle…

 

Nous espérons un nouveau protocole NTIC qui permette aux organisations syndicales de continuer à s’adresser à tous les personnels

 

Nous espérons que derrière le concept de Laïcité que viennent de redécouvrir bien des administrations, dans des formes souvent mal digérées, ne se prépare pas , sous couvert de neutralité des fonctionnaires, une offensive contre la liberté d’expression.

La CGT ne l’acceptera pas et restera très vigilante sur ce sujet.

Enfin, alors que 8 organisations de retraités dont la CGT se mobilisent encore aujourd’hui pour dénoncer notamment la baisse de leur pouvoir d’achat et le délitement des services publics, au sein de votre ministère des personnels (nous parlons là des assistants de service social qui ont intégré le corps de CPIP) voient le montant de leur pension de retraite menacé, ceci est intolérable !

Nous ne lâcherons rien et attendons que vous interveniez pour mettre fin à cet impensable mépris pour les personnels !

 Montreuil le 17 mars 2015