Le SPIP a 20 ans – épisode #3

2019 : État des lieux des personnels en SPIP – volet 1 La filière insertion probation

http://www.cgtspip.org/wp-content/uploads/2019/11/nov-19-20-ans-situation-SPIP-volet-1.pdf

Après avoir consacré les 2 premiers épisodes de cette série sur les 20 ans des SPIP à l’historique de nos services et de la profession de CPIP, la CGT IP propose dans ce 3ème volet de faire un focus sur les personnels en SPIP via :

*Un 1er volet qui aborde la filière insertion probation, sa composition, ses missions statutaires et la déclinaison actuelle.

*Et un 2e volet consacré à toutes les professions qui composent les SPIP.

Ce rappel, qui vise à distinguer les missions du service et celles de chacun des corps qui le compose, apparaît indispensable à l’heure où la DAP cantonne le SPIP à l’évaluation du risque de récidive, occultant la richesse des pratiques de tous les professionnels.

Les Conseillers Pénitentiaires d’Insertion et de Probation 

Historiquement les grilles indiciaires des conseillers d’insertion et de probation étaient avant la réforme de 2010 similaires à celles du corps des ASS. C’est en effet la réforme de 2010 qui a acté ce décrochage de la filière sociale et créé pour les CPIP une grille, certes « surindiciée », mais totalement unique dans tout l’univers de la fonction publique. La CGT a toujours milité contre l’atypisme et l’isolement des corps spécifiques, préférant au contraire des espaces statutaires favorisant les passerelles et la mobilité (intégration, détachement et validation des acquis de l’expérience). Cet isolement s’est vérifié lors du passage en catégorie A des corps de la filière sociale prévu automatiquement par PPCR. Pour les CPIP, il a fallu le mouvement de 2016 pour raccrocher ce wagon et y accéder.

Pour la CGT, ce raccrochage à la filière sociale et la catégorie A sont bien une reconnaissance d’une identité professionnelle forte conforme à nos missions, et d’une autonomie propre à la catégorie A.

Le relevé de 2016 le stipulait ainsi : « … les conditions d’une adaptation des disposition statutaires existantes à la réalité des métiers et à la reconnaissance de la place de la filière insertion probation dans la mise en œuvre de la réforme pénale sont réunies ».

Contrairement à ce que veut bien laisser entendre la DAP et une partie de nos directions, ce passage en catégorie A ne s’accompagne pas d’une (r)évolution dans les missions statutaires et n’est en rien conditionné à la moindre évolution méthodologique, bien au contraire ! Ce nouveau statut marque uniquement la reconnaissance du niveau de missions exercées et des compétences des CPIP. Il raccroche officiellement le corps à la sphère du travail socio-éducatif tout en identifiant ses spécificités liées au mandat judiciaire.

C’est ainsi qu’il formalise que le CPIP est expert en matière de décisions de justice et d’accompagnement socio-éducatif. Il a des connaissances en criminologie et, par son action, un impact sur les libertés individuelles des personnes dont le suivi lui est confié par l’autorité judiciaire. Fort de ces compétences, il procède à l’évaluation initiale et continue de la situation globale des personnes prises en charge. Il conçoit et met en œuvre leur parcours et leur accompagnement individualisé y compris par le respect des obligations judiciaires. Il œuvre encore au travail sur le sens de la peine afin de concourir au maintien ou à la restauration de l’autonomie et à la responsabilisation des personnes suivies. Il contribue à la mise en œuvre et l’animation de partenariats de proximité répondant aux besoins des personnes accompagnées. En milieu fermé, il contribue notamment à prévenir les effets désocialisants de l’incarcération et à préparer la sortie des personnes détenues.

L’encadrement : DPIP & DFSPIP

Si l’encadrement pré-existait, il convient de rappeler qu’avant la création des SPIP, il était assuré par les directeurs d’établissement en milieu fermé et par les JAP en CPAL. La direction interne à la filière ne s’est véritablement développée qu’à compter de 1999. Seuls le corps des Chefs de Service d’insertion et de Probation (CSIP) existait alors. Ceux-ci avaient pour missions la coordination et le conseil technique des équipes. Avec la création des SPIP en 1999, en plus des CSIP, sont apparus les DSPIP (directeur départemental). Puis en 2005, les DPIP furent recrutés dans un premier temps uniquement en interne parmi les CSIP, avant que le concours ne s’ouvre à l’externe à compter de la réforme de 2010 avec une perte. Cette date marque le début d’un accroissement important du corps d’encadrement dans les SPIP et l’extinction de celui des CSIP.

Leur fonction s’oriente dès lors de manière beaucoup plus prononcée sur des compétences de direction, d’organisation et de pilotage de service, s’éloignant du positionnement qu’occupaient les CSIP en matière de conseil technique.

Le corps des DPIP relève de la catégorie A type de la fonction publique. Les missions statutaires positionnent clairement les DPIP sur 3 champs :

˜ L’administration, le management et l’évaluation de l’activité des services ;

˜ La conception, la mise en œuvre et l’évaluation de politiques de prévention de la récidive, d’insertion et de réinsertion des personnes suivies par les services ;

˜ Aux fins d’inscrire l’action du service dans les politiques publiques d’insertion, de probation et de sécurité, ils développent des coopérations (partenariats) avec les autres services publics, les institutions et le secteur associatif.

Ces responsabilités sont exercées par le biais des fonctions d’encadrement, de conception, d’expertise, de direction administrative et de contrôle de leur service. Les DPIP pilotent le travail d’équipes pluridisciplinaires, doivent en coordonner l’intervention et sont garants de la cohésion du travail au sein des services.

Les DFSPIP : il ne s’agit pas d’un corps mais d’un emploi fonctionnel régi par un décret statutaire datant de 2017. Logiquement, ils devraient être issus du corps des DPIP, mais en réalité beaucoup de DSP occupent ces postes.

Ü Pour la CGT, le fait que ces postes soient beaucoup plus facilement accessibles à des agents non issus de la filière est d’ailleurs un vrai problème quand le poste nécessite un niveau très élevé d’expertise en matière de politiques de prévention de la récidive, d’insertion et de réinsertion des personnes sous-main de justice. La valorisation de la filière insertion probation doit également passer par un recrutement sélectif de son encadrement.

Finalement, dans les SPIP, la création des corps d’encadrement demeure récente. Elle doit donc aussi faire face à une évolution du recrutement au sein du corps, et au passage en catégorie A des CPIP.  Les lignes bougent aussi en ce domaine sans que l’administration ne daigne en tenir compte. La discussion en cours sur la validation des rapports en est une parfaite illustration (rappel de notre communiqué : http://www.cgtspip.org/validation-des-rapports-pourquoi-la-cgt-est-pour-sa-suppression/).

˜    MISSIONS : une déclinaison de la DAP en contradiction au regard des statuts

Si la CGT est souvent caricaturée dans ses positions, comme lors de ses prises de positions contre l’Agence du TIG ou la validation des rapports notamment, il convient de rappeler un des axes qui conduit notre action pour l’ensemble des corps qui exercent en SPIP : le respect des missions statutaires, ni plus, ni moins. C’est cette approche qui nous permet de rappeler aux différentes strates hiérarchiques la place et le rôle de chacun, y compris au sein de notre filière.

C’est pourquoi la CGT ne cesse de chercher à savoir ce que la DAP prépare dans le cadre du RPO 2, afin que les fiches de postes qui y seraient développées correspondent bien aux textes et non aux vues de l’esprit de notre Administration.

La réforme statutaire de 2019 est , selon la CGT, venue remettre les choses en place après la réforme ratée de 2010 qui a laissé les CPIP au milieu du gué. Si le Snepap a tenté de faire croire à une pseudo révolution criminologique du métier, il suffisait pourtant de lire le code et les textes pour bien voir qu’il n’en était rien ! En 2019, la DAP tente encore d’orienter l’activité des SPIP et de la filière sur des missions qui ne sont pas les nôtres.

˜ Concernant « l’évaluation », là aussi il convient de ne pas travestir notre discours : la CGT ne fait que rappeler les textes (CPP, lois de 2009 et 2014, LPJ ) qui stipulent que l’évaluation ne peut être détachée de la prise en charge qui en découle, ni se borner à une appréciation d’une dangerosité en tant que telle. Pour la CGT, le principal écueil des quartiers spécialisés tels que les CNE, les QVD ou les QER reste de placer le SPIP dans une position qui ne saurait être la sienne puisque déconnectée du suivi et de la préparation à la sortie.

Et ce n’est pas la pseudo expérimentation à la petite semaine d’un « guide de l’évaluation » qui pourra infléchir notre positionnement qui repose, lui, sur les textes qui jalonnent nos professions.

Notre administration, dont le rattachement au ministère de la justice devrait pourtant favoriser une application précise des textes, préfère en effet se référer à des manuels internes et autres critères de labellisation. Ce constat, qui contribue à brouiller les identités professionnelles, génère incohérence et surcharge de travail dans les services, et est dénoncé de manière constante par la CGT.

=> Pour la CGT, à tous les niveaux, si l’encadrement a bien une fonction, ce serait celle de rappeler les missions de chacun et de défendre la spécificité des SPIP qui ont déjà bien des tâches à accomplir, sans récupérer celles qui incombent aux autres services, notamment les greffes judiciaires ou pénitentiaires.

=> Pour la CGT il faut arrêter de faire des DPIP les contrôleurs quotidiens du travail des agents !  Nos professions doivent être pensées de manière complémentaire. Quand le CPIP est seul technicien de l’accompagnement des personnes avec tout ce que ça englobe comme connaissances, actions, autonomie…, le DPIP doit, lui, organiser le service, favoriser les échanges internes, développer des partenariats adaptés, représenter et défendre le service.

Pour la CGT, la DAP ne sait pas réfléchir sur ses services, services sur lesquels elle voudrait calquer son seul modèle autoritaire pyramidal si peu adapté aux SPIP.

C’est pourquoi la CGT IP revendique une Direction Autonome de la Probation !

=> A suivre : état des lieux 2019 : les autres corps : le SPIP, un service pluridisciplinaire ?