PROTECTION DES PERSONNELS OU DROITS DES AGENTS LA DAP S’ENLISE DANS LE MEPRIS

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La DAP a convoqué les organisation syndicales représentants les personnels aux CT SPIP et CT AP dans le cadre d’une réunion téléphonique pour évoquer les « conséquences de la crise sanitaire » le 16 avril 2020. Matériel de protection (nettement insuffisant), positions administratives des agents, ordonnance sur le retrait de congés (RTT et CA), campagne de mobilité des agents, Plans de Continuité de l’Activité et perspectives de reprises à l’issue du confinement… Les sujets sont toujours multiples et les réponses indigentes :  l’administration n’a manifestement pas rattrapé le retard pris en début de crise et reste incapable d’éclairer nos interrogations…

Préservation des personnels & matériel de protection : quand les détenus protègent les personnels

Contribuant au dogme gouvernemental, l’administration a d’abord assuré de l’inutilité des masques pour en cacher la pénurie, puis se félicite aujourd’hui de la (quasi) autosuffisance qu’elle est en voie d’atteindre via la production de masques par les ateliers de la RIEP (6 000 masques produits quotidiennement ces derniers jours par les détenus travailleurs).  A ce jour les personnels en contact avec la population seraient tous équipés et l’objectif est de pouvoir bientôt doter tous les personnels. La ligne de conduite de la DAP consisterait à ne pas doter différemment les agents et que tous disposent de masques lavables.

Tous ? Non ! Un petit service nébuleux dénommé « SPIP » est encore et toujours oublié. La dotation des milieux ouverts ne fait pour l’heure pas partie des objectifs mais des « hypothèses » de la DAP !

Mais rassurez-vous la reprise de l’activité est-elle, bien envisagée…

  • Sur la question des dépistages : en lien avec la question du déconfinement, le DAP a reçu l’assurance que les établissements pénitentiaires, ses personnels mais également la population pénale seraient dépistés de manière systématique mais cette décision repose sur les autorités sanitaires, en plus de la capacité de production des tests. Les régions les plus touchées par le Covid 19 seraient prioritaires . Encore une fois, elle n’implique aucunement les personnels des SPIP !

Les positions administratives et leurs incidences

S’il semble que les services RH locaux mettent actuellement à jour les compteurs Origine, les incidences des positions administratives restent pourtant encore plus que floues. La CGT dénonce l’absence totale d’information donnée aux agents sur les conséquences des positions administratives dans lesquelles ils ont été (ou seront rétroactivement) placés depuis le début de la crise.

Si la position en ASA semble la plus largement enregistrée, il semble qu’il y ait une volonté de l’administration d’en distinguer les motifs. Pourquoi ? Les diverses situations justifiant ce placement (impossibilité de télétravailler – garde d’enfants – personnels vulnérables…) engendreraient-t-elles un traitement différent ?

Nombre de collègues malades ou développant des symptômes suspects se sont vu placer en ASA par les hiérarchies locales. Cette position est tout simplement scandaleuse, il est indispensable que ces agents soient placés en CMO et que le Covid19 soit reconnu comme maladie professionnelle. 

Enfin, du fait de leur mission, mais surtout de l’absence de matériels adéquat, l’accès au télétravail n’a pu se faire que de manière très limitée dans les SPIP. Pour autant, la multiplicité des situations et des niveaux d’exigence envers les personnels révèle que les positions administratives sont loin de correspondre avec la réalité du travail effectué. Certaines directions ont interdit le télétravail (avec ou sans matériel de l’administration), tandis qu’ailleurs un « travail à domicile » sans matériel aucun s’est vu pratiquer, et d’autre encore ont donné des consignes régulières de travail aux agents, même à ceux positionnés en ASA… Il en découle des inégalités flagrantes sur le traitement des agents, mais également des incertitudes multiples sur la reconnaissance qu’il en sera fait par l’administration. La reconnaissance ou non du travail opéré à domicile – en dehors de tout règlement d’ailleurs – aura des conséquences sur les congés des agents et reviendra possiblement à ce que leur implication dans la continuité du service public soit tout simplement ignorée !

Par contre, comme par hasard, les différents niveaux de hiérarchie se sont auto largement arrogés le droit au télétravail – certains fuyant leurs services tout en exposant leurs personnels –s’appropriant les rares dotations pour ce faire.

=> La DAP reconnait un défaut d’harmonisation des pratiques et les organisations syndicales sont unanimes sur le rôle dévastateur des directions interrégionales en la matière. Ces positions administratives devraient trouver un cadre très prochainement via des instructions et une note du Secrétariat Général. Les notes locales ou régionales antérieures n’ont aucune valeur.

Quant aux dotations matérielles, la DAP reconnait aussi une sous dotation des postes administratifs et de CPIP et envisage en solution post crise de changer d’échelle en dotant chaque agent individuellement.

 Pour la CGT, compte tenu du caractère subi de ces positions administratives, du défaut d’information initial et continu de l’administration sur les incidences de chaque position, de l’impossibilité matérielle de télétravailler pour tous, voire de son interdiction : il est indispensable que tous se voient reconnu cet investissement et soient placés dans une position administrative favorable. Il s’agit de reconnaître l’investissement de tous les agents qui ont assuré ou se sont vu empêcher d’assurer la continuité officielle ou officieuse du service public.

Les congés et l’ordonnance du 15/04/20 sur les RTT

La CGT avait saisi la DAP au début de la période des vacances compte tenu des consignes variées passées par les hiérarchies locales. Depuis une ordonnance a été publiée imposant le dépôt de congés sur la période de la manière suivante :

  • 10 jours (dont 5 RTT et 5 CA) pour les agents ayant été en ASA sur la période de confinement, et ce pour partie de manière rétroactive ! Ce montant sera proratisé (on ne sait pas comment) pour les agents ayant alterné entre  ASA et permanences dans le cadre des PCA.
  • Les agents reconnus en télétravail ne sont pas soumis à ce dépôt obligatoire sur la période de confinement, mais pourront eux se voir imposer 5 jours de congés par les chefs de services.

Si la DAP interroge actuellement la DGAFP sur l’hypothèse d’une exonération de cette ordonnance pour les agents sous statut spécial, l’affaire semble mal embarquée… C’est là que le manque d’informations et les incertitudes sur la reconnaissance des différentes positions administrative prend tout son sens !

A noter que ces congés ne permettent pas de générer les jours de fractionnement et que, par ailleurs, les jours d’ASA entrainent une proratisation des RTT et congés compensateurs. C’’est donc au final 15 jours de congé que pourraient perdre certains collègues !!

Pour la CGT, la retenue de congés prévue par l’ordonnance est démesurée :  deux fois supérieure à ce qui est prévu dans le privé, elle prévoit de prélever plus de RTT que ce que génère un agent travaillant sur la même période ! Pour la CGT il est hors de question qu’un tel prélèvement s’opère sur des agents tous mobilisés à leur manière pendant la crise.

Une solution existe, qui allie droit des agents et organisations de service : le report sur l’année 2021.

  • La question de la prime offerte aux fonctionnaires : décision prise en Conseil des Ministres, elle devra être rediscutée au sein des différents ministères et administrations. Elle sera modulable (1000 € restant un plafond – attribution au 1/3 ou au 2/3) selon différentes conditions (essentiellement contact avec le public) et plusieurs critères : participation aux PCA, augmentation de la charge de travail, durée d’intervention sur la période. Ne surtout pas oublier que les CPIP pourraient en être tout simplement exclus…

La mobilité des CPIP  – La situation des élèves et des stagiaires

Mauvaise habitude notoirement reconduite d’année en année, la note de mobilité des CPIP qui aurait dû être prête avant d’entrer en état d’urgence sanitaire, n’est toujours pas sortie…Toutes les mobilités des corps de la DAP ont été suspendues et les calendriers seront donc remaniés.

Pour la CGT, il est indispensable que les calendriers de mobilité soient le plus rapidement possible adressés aux agents et qu’ils assurent une campagne qui offre tout à la fois un temps raisonnable aux agents pour faire leur choix et des résultats à une date qui permette d’assurer leurs démarches.  

L’administration a choisi pour les CPIP un calendrier basé sur l’année scolaire qui n’offre qu’une seule campagne ; la publication des résultats doit respecter ce timing.

  • Réouverture de l’ENAP et position des élèves et stagiaires : la réflexion sur la réouverture de l’ENAP est commune à toutes les écoles des administrations qui ne souhaitent pas se voir alignées sur les universités mais qui veulent bénéficier d’une réouverture dès la fin du déconfinement, même progressif. Les directions ne veulent revenir ni sur les contenus, ni sur les méthodes d’évaluation, ce qui parait intenable sauf à exposer les personnels formateurs et élèves.

La question du calendrier de mobilité a aussi une incidence pour les élèves et stagiaires de l’ENAP. Nos collègues en apprentissage ont besoin de connaitre les modalités et le calendrier qui sera retenu pour leurs évaluations, mais surtout les dates de l’amphithéâtre d’affectation et de la prise de poste concernant les stagiaires.

PCA, reprise de l’activité et dialogue social

Depuis le début de la crise, la CGT dénonce la confusion, causée certes par la situation exceptionnelle au départ, mais entretenue par l’administration qui à aucun moment ne s’est adressée à ces personnels – autrement que par une communication ministérielle creuse et à 1000 lieues des attentes des agents.

Pour la CGT, il est essentiel d’adresser rapidement aux agents une information sur l’ensemble des dispositions RH qui les concernent déjà et les mesures de protection qui accompagneront la reprise.

La DGAFP a récemment rappelé que si les réunions doivent être organisées en tenant compte du confinement, le dialogue social doit se poursuivre. C’est dans cet esprit que la CGT IP a demandé à être destinataires de l’ensemble des notes, y compris RH adressées aux services déconcentrés par la DAP, mais également la tenue d’un CT SPIP le plus rapidement possible.

> Nous invitons les élus à décliner les mêmes demandes localement.  

Pour la CGT, il est indispensable d’organiser à tout niveau des réunions d’information et des instances pour évoquer la situation en cours mais aussi prévoir la suite. Il est temps si ce n’est déjà fait de saisir des PCA : ce document n’ayant pas été formellement diffusé à l’ensemble des personnels, nous invitons l’ensemble des élus des CT locaux à le demander à leur hiérarchie, puisque cela relève aussi de l’organisation des services. C’est d’autant plus important que depuis quelques jours, certains services rappellent plus d’agents sur les permanences.

Interrogée, la DAP précise qu’elle ne connait pas le « taux d’absentéisme » des agents en SPIP mais indique toutefois que le PCA est un document écrit définissant les activités essentielles qui doivent être assurées par le service. Ces activités peuvent évoluer, ayant donc un impact sur le PCA mais cela doit s’opérer par l’intermédiaire d’une modification écrite. Il est donc temps que les directions exposent les choix opérés, et qu’en cas de velléité d’accroitre l’activité et donc la présence des agents, les représentants des personnels puissent y ajouter les réserves indispensables liées notamment aux dotations en moyen de protection et de dépistage

  • La sortie de crise doit se réfléchir dès à présent : compte tenu du manque de visibilité de la gestion de crise, et a fortiori de sa sortie, il est indispensable de poser des préalables à toute reprise, en terme de protection des personnels bien sûr, mais aussi d’une nécessaire progressivité de la reprise d’activité. Un temps d’accueil et de débriefing au sein des services, une information personnalisée sur les situations de chacun, des échanges sur ce qui a été entrepris auprès des personnes suivies, des difficultés rencontrées sont autant de préalable à une reprise qui sera suffisamment source d’inquiétudes et de surcroit de travail.

Pour la CGT, le retour des agents ne doit pas correspondre au retour des entretiens, un sas doit être envisagé et des aménagements prévus dans tous les services pour continuer d’assurer les règles de protection et de distanciation.

En définitive, cette première phase de confinement laisse déjà un goût amer pour les agent.es du service public de la justice qui depuis un mois se sont vu refuser les mesures élémentaires de protection pour poursuivre leurs missions au prix de leur santé parce qu’il fallait couvrir ce qui devient un mensonge d’Etat : l’absence d’anticipation et la pénurie ! Pire, le gouvernement, au terme de cette première période continue d’attaquer les droits obtenus de haute lutte en saccageant le droit aux congés en pleine pandémie !

La période reste révélatrice des problématiques provoquées par des années de politiques d’austérité et de démantèlement des services publics, et notre secteur n’est pas épargné. Il y a deux mois nous manifestions partout en France et devant la DAP pour dénoncer les atteintes aux droits, les conditions intenables pour accomplir nos missions, les moyens indigents alloués aux SPIP pour fonctionner au quotidien et faire face à une activité exponentielle, au détriment bien souvent du public, mais aussi des personnels qui sont pris en étau dans autant d’injonctions paradoxales !

La (non) gestion de la crise sanitaire renforce ces difficultés et fait apparaitre au grand jour la pénurie dans laquelle les SPIP sont placés. La DAP découvre que des agents n’ont même pas de téléphone portable opérationnel : bienvenue dans notre monde !

Le dépit, la colère s’installent durablement : l’absence totale d’information, la surexposition inutile des agents et les menaces qui l’accompagnent, l’attaque des droits, les ruptures d’égalité entre agents, services, régions, sont autant de ferments qui les nourrissent légitimement.

le 16 Avril 2020