Chronologie d’un désastre social annoncé ?

L’arrivée de nouveaux collègues CPIP en septembre 2021 constituait un soulagement, certes relatif mais réel : les CPIP de Caen allaient enfin avoir davantage de temps pour assurer des suivis plus qualitatifs des personnes condamnés et prendre du recul sur leur pratique.


Une fois de plus, l’espoir est retombé, notre propre hiérarchie (de la DAP au local) s’empressant de le tuer dans l’oeuf.


La recette est toujours la même : envoi par mail de nouvelles consignes, absence d’anticipation des réformes, définition unilatérale des priorités intenables pour les équipes. Par ailleurs, en oubliant ce qu’est le travail quotidien d’un CPIP et de résoudre les problématiques concrètes, les risques psycho-sociaux ne sont pas loin. Petites explications du processus.

L’envoi de consignes par mail pour faire toujours plus


Dernièrement, les consignes liées aux dernières dispositions judiciaires ont été transmises aux équipes par voie de mails, sans échange : formulaire du « droit au silence », ordonnances d’affectation des TIG, décisions de modification horaire.
Donc faire toujours plus mais sans ouvrir la porte de la communication.


L’absence d’anticipation des réformes


Le MO a vu arriver des « vagues » d’enquêtes victime, à réaliser dans de courts délais, en « application » du décret relatif aux auteurs de violences conjugales. Pourtant, rien n’indique dans le texte que le SPIP soit saisi de telles enquêtes. La Direction locale laisse faire, sans consigne particulière et les CPIP subissent.
La Direction semblait aussi ignorer que nous sommes aussi saisis d’enquêtes demandées par la CHAP : saisines effectuées par voie de mail et non APPI, ce qui rend en plus invisible cette nouvelle charge de travail.
Enfin, s’il semble que des ESR et des TNR arrivent au SPIP MO de façon plus importante qu’auparavant : notre Direction ne semble pas davantage préoccupée par l’ampleur des nouvelles tâches…
Il faut tout faire, sans aménagement possible, sans information préalable, sans envisager des organisations de service de nature à protéger les agents.

La définition unilatérale des priorités intenables pour les équipes


Depuis des mois, la Direction du SPIP de Caen n’a qu’un seul mot d’ordre : la SAS (qui ouvre en mai 2023). La Direction s’étonne qu’il y ait peu de volontaire pour constituer un groupe de travail.
Elle ne s’est jamais dit que c’était parce que nous n’avions pas le temps ????
Elle oublie que d’autres groupes de travail existent, que des collègues participent déjà aux groupes
pilotés par l’établissement sur l’ouverture de la nouvelle MA et de la SAS.
Mais, ce n’est pas suffisant : la Direction décide unilatéralement de constituer une équipe projet
constituée de 5 CPIP. Leur objectif : « piloter » des sous-groupes, prospecter les partenaires, rédiger
des conventions, rédiger des fiches de procédure… La Direction invente de facto de nouveaux DPIP.
Par ailleurs, la décharge accordée à ces 5 agents va augmenter la charge de travail des autres, qui
devront eux-mêmes s’impliquer dans les sous-groupes…

Face à l’augmentation de la charge de travail, aucun allégement de tâches n’est proposé, ce
qui aurait constitué un vrai soulagement pour les collègues.


Il va de soi que notre Direction locale n’est franchement pas aidée par la DI qui décharge à temps plein des personnels de détention en prévision de l’ouverture de la MA mais qui ne daigne pas offrir de telles conditions de travail à des personnels de la filière insertion et probation… C’est dire la considération de la DI à l’égard de la place des SPIP dans les établissements…
La CGT-IP a toujours rappelé que, si la présence de CPIP dans les groupes de travail est nécessaire pour associer les personnels sur les sujets importants, il est toujours conditionné par au moins 2 éléments : l’adaptation à la charge de travail et l’assurance qu’un DPIP soit le pilote et celui qui « tranche » si besoin.

L’oubli du travail quotidien des CPIP et les problèmes qui ne sont jamais résolus


La CGT-IP le répète : n’en déplaise à certains, l’essence de notre métier est de rencontrer des personnes condamnées, leur consacrer du temps dans l’exécution de leur peine (solliciter des partenaires, répondre à leurs questions, placer des TIG, assurer des prises en charge collectives, etc…).
Et nous n’avons déjà pas suffisamment le temps de le faire de façon optimale. La multiplication des enquêtes à court délai déstabilise les équipes qui ne peuvent plus concilier le suivi des personnes
condamnées qui s’inscrit dans le temps et les enquêtes à réaliser « toute affaire cessante ».
La Direction s’entête, sans doute sous la pression, à mettre toutes les forces du SPIP dans l’ouverture de la SAS et donc à mettre également ses agents sous pression. En revanche, point de réponses aux sujets problématiques qui perdurent, parfois depuis plusieurs années : inaccessibilité des structures de soins pour le public, relation avec les magistrats mandants, modifications des horaires DDSE…

Au final, les personnels doivent trier dans toutes leurs tâches obligatoires ce qu’ils peuvent ou
pas faire, quitte à se mettre en danger professionnellement


Toute notre chaîne hiérarchique (Ministère, DAP, DI, direction locale) n’a ni pensé ni anticipé l’arrivée des réformes et la surcharge de travail induit, laissant les agents s’épuiser et dans une grande insécurité juridique.
Point de réponse espérée au niveau de la DAP et de la DI qui ne semblent que préoccupées à restreindre les droits des agents (restrictions du télétravail, vol des heures supplémentaires….).
Pourtant, le sujet des victimes de violences conjugales et des ESR par exemple auraient mérité un peu plus d’intérêt de la part de notre administration.

Face à la multiplication des demandes, à la pression de la hiérarchie, les agents s’échinent à faire ce qu’ils peuvent mais sont obligés de faire des choix. La Direction ajoute des missions mais n’en retire aucune. L’espoir issu de l’arrivée de renfort en septembre 2022 n’existe plus ou peu.
Les personnels administratifs, toujours en nombre insuffisant, doivent eux-aussi absorber de nouvelles tâches.


Pour la CGT-IP, les CPIP sont avant tout des travailleurs sociaux de terrain qui évoluent dans un cadre législatif et réglementaire précis ; nous n’avons pas le luxe aujourd’hui de faire plus, tant les réformes se succèdent et ajoutent des actes professionnels conséquents.
Insinuer aux équipes que le suivi individuel n’est pas important est une grossière erreur, tant sur le plan de la responsabilité professionnelle des agents que sur l’organisation du SPIP.


L’entêtement de notre Direction de constituer des groupes de travail SAS avant l’arrivée de renfort en septembre prochain va certainement finir de démotiver certains agents et les placer en situation de fragilité psychologique.


Madame la Directrice, vous vous référez aux RPO pour beaucoup de sujets : nous nous permettons de vous rappeler qu’il s’agit d’une méthode d’évaluation des publics, pas une méthode de management des équipes pour les motiver ni une méthodologie de projet !


La CGT-IP SPIP 14