COMITE TECHNIQUE SPIP du 18.02.20 : déclaration liminaire

http://www.cgtspip.org/wp-content/uploads/2020/02/fev-20-Dl-Ct-SPIP.pdf

Monsieur le président,

Situation particulière ce jour, puisque ce sont 2 comités techniques qui vont s’enchaîner. En effet, après 19 semaines de suspension, pulvérisant au passage le récent record du comité technique ministériel, le comité technique SPIP, suspendu le 7 octobre dernier, se ré-ouvre donc ce 18 février 2020. Nous pensons, bien sûr que, ce délai aura permis à vos équipes de préparer des réponses pertinentes à l’ensemble des points portés à l’époque à l’ordre du jour par la CGT insertion Probation et restés depuis sans réponse, et de préparer méticuleusement le nouveau CT.

A l’issue se tiendra un 2e C.T SPIP puisque les élus CGT en ont fait la demande début janvier, ne voyant aucune proposition de travail sur les organigrammes et la mise en œuvre de la LPJ.

Ces C.T SPIP interviennent dans un contexte très particulier où se croisent une casse sans précédent des droits des agents de la fonction publique (mobilité /retraite) et l’arrivée d’une vertigineuse charge de travail supplémentaire avec la loi de programmation justice. Ces deux sujets ont en commun l’impréparation totale de l’administration et le mépris flagrant envers les agents .

Les lignes directrices de gestion ont fait l’objet d’une présentation trop tardive qui a privé à dessein les représentants des personnels de la possibilité de discuter avec l’administration de la possibilité d’être placés dans l’annexe du décret et ainsi de conserver une mobilité équitable. Cette nouvelle forme de gestion s’est ensuite imposée sans discussion, sauf lorsque la résistance des terrains, à l’initiative de la CGT insertion probation a permis de mettre en lumière le caractère individualiste, rétrograde et discriminant de ce projet. La détérioration des conditions de travail des agents va avoir un impact sur la qualité du service rendu, et sur la transparence que le service public doit aux usagers sur son fonctionnement. Plus largement, ce processus dessine pour la CGT une mise au pas de l’administration sous un pouvoir exécutif de plus en plus autoritaire.

De la même façon, la loi de programmation justice s’est construite sans consultation réelle et sans tenir compte de l’avis des professionnels qui ont largement alerté sur l’échec à venir. Les décrets qui sont venus préciser le projet sont tardifs, incomplets et rédigés de manière unilatérale. Le retrait à l’ordre du jour de la circulaire d’application DDSE, seul texte non encore publié, nous confirme que l’absence de concertation est toujours d’actualité. Décidément le dialogue vous fait peur ! De notre côté c’est plutôt l’ensemble de votre œuvre qui nous effraie !

Le Comité technique ne peut se réduire à aborder des thématiques imposées de manière verticale. Pour la CGT, cette instance doit aussi et avant tout rester un espace d’échanges et de réflexions mutuels que vous nous confisquez à coup d’actualité de pure logique gestionnaire. Quand allons nous pouvoir véritablement réfléchir au sens de notre intervention ?

Il ne vous aura pas échappé que l’entrée en vigueur des mesures de la LPJ sont presque concomitantes de la nouvelle condamnation de l’État français par la CEDH* pour conditions de détention inhumaines et dégradantes. En plus de cet arrêt, qui constate l’ineffectivité des voies de recours offertes aux personnes détenues, la CEDH invite aussi la France à prendre des mesures générales pour mettre fin à la surpopulation qui asphyxie les prisons françaises.

Cette condamnation arrive deux mois après l’avis du Conseil Economique, Social et Environnemental ** adopté à l’unanimité sur la question de la réinsertion des personnes détenues et sur la place accordée à cet objectif dans les missions et les moyens des services pénitentiaires. Le constat est sans appel : pénurie, manque de moyens et d’objectifs, absence de sens, c’est tout un système de pensée et de prise en charge qu’il faut réviser.

Ces deux formes de désaveux de notre système pénal renvoient au problème fondamental qui traverse notre administration depuis plus d’une quinzaine d’années : notre système est structurellement voué à l’échec. Toute référence à la peine reste marquée par le sceau de l’incarcération et ne permet pas une vraie pensée alternative de la peine .

Pour la CGT IP, l’incapacité de l’Administration pénitentiaire – et donc du Ministère de la justice, à offrir des garanties à ses personnels est le pendant de son inaptitude à penser toute forme de pénalité qui ne se résumerait pas à la privation de liberté, par des moyens physiques et/ou technologiques. La promotion d’une véritable probation ne peut que passer par la création d’une direction autonome, seule à même d’asseoir la reconnaissance de nos métiers, de notre utilité sociale et professionnelle, en dehors du prisme de l’industrie pénale mais véritablement tournée vers l’émancipation.

Pour la CGT, le message envoyé par le Ministère est clair et nous conforte dans notre revendication d’une direction autonome de la probation.

* Cf. : https://hudoc.echr.coe.int/eng#{%22itemid%22:[%22001-200446%22]}

** Cf. : https://www.lecese.fr/travaux-publies/la-reinsertion-des-personnes-detenues-l-affaire-de-tous-et-toutes

Montreuil, le 18 Février 20