MOBILITÉ : LES DROITS DES AGENTS SACRIFIéS

Chronique de la réforme de la fonction publique adaptée au Ministère de la Justice qui enterre le droit à la mobilité de ses fonctionnaires

Ce lundi 18 novembre, a été enterrée officiellement la mobilité telle que connue jusqu’ici pour les personnels du Ministère de la Justice. Le Secrétariat Général a en effet présenté à l’ensemble des organisations syndicales les lignes directrices de gestion ( LDG) relatives à la mobilité des agents. Ce document vient définir les principes de fonctionnement communs à tous les corps de fonctionnaires du ministère de la Justice à compter de 2020. Il s’appliquera en remplacement des CAP de mobilité, supprimées par la loi du 6 août 2019 dite de transformation de la fonction publique. Au-delà de la perte d’une indispensable instance de dialogue social au sein de laquelle les syndicats jouaient un rôle fondamental, c’est tout simplement l’accès à la mobilité en tant que tel et le traitement équitable et objectif de tous les agents auxquels les LDG mettent fin aujourd’hui. Son contenu est tout simplement inacceptable pour la CGT. 

=> Fin des critères de cotation 

Ces critères permettaient l’application d’un barème connu de tous et déterminant la mobilité de chaque corps. Mais pour que ces cotations continuent à être prises en compte, il eut fallu bénéficier du maintien d’un tableau périodique de mutation. Or dans notre Ministère, seul en bénéficiera dorénavant le corps d’encadrement et d’application (les surveillants). Si la DAP affirme avoir demandé que celui-ci soit maintenu pour les CPIP, le SG ne retient pas cette option et selon la secrétaire générale du ministère ce serait une décision gouvernementale… Ce n’est donc pas discutable…

Pourtant d’autres corps de catégorie A (enseignants et professeurs agricoles, personnels des services déconcentrés des douanes, police nationale…etc) vont continuer d’en bénéficier.

Cette règle est donc bien définie selon la volonté de chaque Ministère

=> La mobilité à compter de 2020 ce sera donc ça 

2 périodes de mobilité (avec prise de poste le 1er septembre et le 1er mars)

Une note de mobilité listant les postes vacants et ceux susceptibles de devenir vacants.

– La possibilité de postuler sur 7 postes pour les agents de catégorie B et C  (SA, AA); ou 5 postes pour les catégories A (ASS, CPIP, attachés).

– Une mobilité qui se fera quasi exclusivement sur du profilage (seuls une partie des Adjoint administratifs y échapperont !) 

=> Pour participer au casting 

Nécessité de candidater avec CV, lettre de motivation, relevé de carrière. Pour les catégories A, B et même certains postes de catégorie C, cette 1ère étape sera suivie d’un entretien obligatoire (sauf si le n+1 écarte la candidature à l’étape du dossier papier).

Et attention, en 2020 vous serez peut-être exclus ou contraints d’y participer ! Il est en effet envisagé d’ajouter dès l’année prochaine des durées d’affectation minimum et maximum sur un poste.

=> A l’issue de ce processus 

Le choix du meilleur candidat aux yeux du seul directeur du service d’accueil déterminera les suites données à la demande de mutation. Oubliez donc tous les critères objectivant le choix de celle ou celui qui sera retenu. Contrairement à ce que permettaient les critères de cotation, nous ne saurons pas ce qui a motivé ou rejeté une demande de mutation. Et ce n’est qu’en cas d’égalité entre candidats qu’interviendront pour les départager :

– Les critères légaux de priorité (CIMM, reprochement de conjoint, rapprochement familial…)

– Une éventuelle situation sociale.

=> La possibilité de recours ? 

Seule solution en cas de désaccord / de doute sur la légitimité d’un refus de mutation : le recours. Néanmoins, sans critères de mobilité objectivement définis, difficile de le motiver ! D’autant plus lorsque l’un des critères de sélection est « le potentiel » de l’agent.

Et pourtant les risques de dérive ne manquent pas : problèmes de santé générant des arrêts maladie, nombre d’enfants, de jours enfant malade, potentiel projet de grossesse, temps partiel, activité syndicale, un certain nombre de collègues risquent de se faire écarter pour des raisons pas tout à fait légales mais qui resteront invérifiables…

La logique qui veut qu’un fonctionnaire soit recruté 1 fois par le biais d’un concours et puisse ensuite exercer ses missions indifféremment dans n’importe quel SPIP est dépassée.

Il faudra désormais se faire recruter comme « collaborateur » dans un nouveau service à chaque mutation. La carrière doit primer sur l’équilibre personnel.

Mais ces critiques, le Ministère ne les entend pas, pas plus qu’il ne voit les injustices que ce système va générer… Tout ne serait que progrès, monde moderne, rentabilité, augmentation des mobilités, simplification de la procédure et choix des collaborateurs par les directions… Bienvenue dans le monde de l’entreprise !

Si le projet n’est pas encore définitif, il est clairement verrouillé. Pour les corps communs du ministère les dés sont déjà jetés. La DAP, les Services Judiciaires et la PJJ doivent encore travailler la déclinaison de ces LDG pour chaque corps propre de leurs administrations, mais sans marge aucune au vu des règles communes à l’ensemble des personnels établies au niveau par Secrétariat Général.

L’absence de dialogue et la volonté d’imposer ces lignes directrices sont telles que le Ministère a déjà prévu la date de convocation du Comité Technique Ministériel de repli afin de faire face à un boycott ou un vote unanime contre des organisations syndicales.

Face à cette régression inadmissible des droits des agents,

Face à la transposition dans la fonction publique d’un management néolibéral inadapté à nos missions,

Face au refus manifeste d’un véritable dialogue social,

Construisons, ensemble, un rapport de force !

SEULE UNE MOBILISATION MASSIVE DES AGENTS  PEUT ENCORE FAIRE BOUGER LES LIGNES